AIR - avril 2023

Palladiam, petite gersoise solide et légère comme le titane

 

Le Gers est réputé pour sa gastronomie roborative que certains jugent parfois un peu lourde. Mais le Gers sait aussi, et c’est moins connu, faire dans le très léger… C’est ainsi qu’à Preignan, à une dizaine de kilomètres au nord d’Auch, la société Palladiam compte parmi les rares spécialistes français du titane et des métaux spéciaux (Inconel, Tantale…). Une expertise hautement stratégique à l’heure des tensions sur ces métaux sensibles.

Cette année, Palladiam soufflera ses trente bougies. « Et la fête se tiendra dans le Gers ! », se réjouit Philippe Auvinet, son président. Car l’entreprise spécialiste du titane a quitté l’agglomération toulousaine en décembre 2021 pour de nouveaux locaux à Preignan, près d’Auch. Un choix que le directeur ne regrette pas. « Expédier les commandes depuis le Gers ou Toulouse revient au même, mais la qualité de vie est incomparable » détaille-t-il. D’autant que chez Palladiam, on travaille en famille. En plus de sa femme à la comptabilité et de son fils, commercial, Philippe Auvinet emploie une personne à la Qualité et une autre à l’atelier. Cinq Gersois, une petite équipe « qui nous permet d’être très réactifs », souligne le directeur.

 

Le titane est abondant mais l’industrie aéronautique absorbe près de 90% de la production. Depuis la reprise post-pandémie chez les avionneurs, cumulée à la guerre en Ukraine, le marché est en tension et les prix ont explosé.

Philippe Auvinet, Président Palladiam

 

Une petite équipe pour de grands projets

Chez Palladiam, c’est la finesse du service qui compte. L’entreprise a peu de concurrence, à l’exception des « stockistes » des grands industriels qui font des réserves de masse, parfois plusieurs tonnes de métal et sur plusieurs années. Le fonctionnement de la petite entreprise gasconne est totalement différent. « Nous faisons du détail », précise Philippe Auvinet. Son père Jean, ancien responsable des matériaux et structures au Centre d’essai aéronautique de Toulouse (CEAT), a fondé Palladiam en 1993. D’abord société de conseil, elle évolue ensuite vers le négoce du titane. Pour ce faire, le jeune Philippe se forme sur le terrain : il passe un mois en Russie chez VSMPO, le plus gros producteur mondial, et à son retour, lance l’activité qui se poursuit aujourd’hui : distribution de matériaux non ferreux, du titane mais aussi de l’inconel, un alliage en base nickel très utilisé dans l’industrie aéronautique. À l’atelier, de la découpe mais pas d’usinage, bien que Palladiam propose aussi des produits finis à l’aide de son réseau de sous-traitants dont la plupart se situent en région toulousaine.
L’activité se concentre sur le marché national avec une clientèle diversifiée : grands avionneurs, industriels variés du secteur naval ou encore médical. L’export attendra : « un développement international nécessite de gros moyens. Or le marché français est encore très porteur », explique Philippe Auvinet. Le titane est un semi-précieux qui se démocratise et Palladiam réalise ainsi environ 2 millions d’euros de chiffre d’affaires annuel. La période est plutôt faste même si des inquiétudes planent au-dessus de l’Europe de l’Est, une zone riche en matériaux qui s’achètent tous en dollars. Si le titane reste « abondant », sa production est en tension, presque totalement absorbée par l’industrie aéronautique : léger et résistant, il est un matériau de choix pour les pièces à charge, turbines, trains d’atterrissage, ainsi que la visserie. Biocompatible (implantable dans le corps humain), et doté de propriétés mécaniques particulières, il est aussi convoité par le secteur médical pour la fabrication notamment de prothèses orthopédiques. Et d’autres s’y mettent : « bijouterie, horlogerie… on trouve du titane partout, maintenant », constate Philippe Auvinet. Le métal coûte de 40 euros à 100 euros le kilo en fonction de sa complexité. Les prix se sont envolés depuis le début de la guerre en Ukraine, « 30% à 40% » de hausse en un an selon le directeur, qui s’attend prochainement à « une stabilisation » mais n’espère pas de marche arrière : le titane est indispensable, même à prix d’or. Et les producteurs l’ont bien compris. Face à ce constat, Airbus et Safran devraient finaliser prochainement l’acquisition d’Aubert et Duval (Ariège) et de sa filiale EcoTitanium.

> www.palladiam.fr

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